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SAS : Kbis et Directeur Général, la Représentation n'est pas Automatique !

June 15, 2022

La Cour de cassation, dans un arrêt rendu par sa chambre commerciale le 25 mai 2022 (n° 20-21.460 F-D), a rappelé un principe fondamental concernant la représentation des sociétés par actions simplifiées (SAS) à l'égard des tiers. Cette décision vient préciser la portée de la mention du directeur général sur l'extrait Kbis et souligne l'importance des statuts dans la détermination des pouvoirs de représentation.

Faits et Procédure

En l'espèce, dans le cadre d'une procédure de visite et de saisie diligentée par l'administration des douanes, une SAS a contesté la régularité de ces mesures, arguant notamment du refus de remise de l'ordonnance autorisant les opérations à son directeur général, seul présent sur les lieux en l'absence du président. La cour d'appel avait annulé la visite et les saisies, considérant que la mention du directeur général sur l'extrait Kbis lui conférait une apparence de pouvoir de représentation que l'administration ne pouvait ignorer.


Décision de la Cour de Cassation : Primauté des Statuts sur le Kbis

La Cour de cassation a censuré l'arrêt de la cour d'appel. Elle a rappelé que si l'article L. 227-6 du Code de commerce prévoit que la SAS est représentée par un président, les statuts peuvent également prévoir la désignation de directeurs généraux ou de directeurs généraux délégués auxquels le pouvoir de représenter la société à l'égard des tiers peut être conféré.


La Haute Juridiction a ainsi réaffirmé une jurisprudence constante (Cass. com. 21-6-2011 n° 10-20.878 FS-PB) selon laquelle la simple mention du titre de directeur général sur l'extrait Kbis ne suffit pas à établir son pouvoir de représentation. Il incombe à la juridiction de vérifier si les statuts de la SAS attribuent expressément un tel pouvoir à cette fonction.


Portée et Implications de la Décision

Cette décision de la Cour de cassation met en lumière la distinction cruciale entre l'opposabilité des mentions du Kbis et la réalité des pouvoirs statutaires au sein d'une SAS.


  • Le Kbis : une indication, pas une preuve absolue de représentation. Conformément à l'article R. 123-54 du Code de commerce, l'identité des directeurs généraux doit figurer sur l'extrait Kbis. Cependant, cette inscription a une vocation informative et ne saurait suppléer une absence de pouvoir de représentation statutairement défini.

  • La primauté des statuts. Les statuts constituent la loi des parties et définissent l'étendue des pouvoirs des organes de la société, y compris ceux des directeurs généraux. C'est donc dans ce document fondamental qu'il convient de vérifier si un directeur général est habilité à représenter la SAS à l'égard des tiers.

  • Sécurité juridique des tiers. Bien que le Kbis puisse induire en erreur, la jurisprudence protège les tiers contractant de bonne foi avec une SAS. En vertu de l'arrêt du 9 juillet 2013 (Cass. com. 9-7-2013 n° 12-22.627 F-PB), la société ne peut se prévaloir d'une absence de pouvoirs statutaires de son directeur général pour se soustraire aux engagements pris par ce dernier. Inversement, les tiers peuvent invoquer une limitation statutaire des pouvoirs pour contester un acte.


Recommandations Pratiques

Au regard de cette jurisprudence, il est essentiel pour les praticiens et les entreprises de porter une attention particulière à la rédaction des statuts des SAS concernant la désignation et les pouvoirs des directeurs généraux. Pour les sociétés souhaitant confier à un organe des fonctions de direction ou de gestion purement internes, il est recommandé d'éviter l'utilisation des titres de directeur général ou de directeur général délégué afin de prévenir toute confusion quant à leur pouvoir de représentation à l'égard des tiers.


Conclusion

L'arrêt de la Cour de cassation du 25 mai 2022 rappelle avec force que la mention d'un directeur général sur le Kbis d'une SAS ne présume pas de son pouvoir de représentation.


La vérification des statuts demeure indispensable pour s'assurer de l'étendue des pouvoirs des dirigeants sociaux et garantir la sécurité des relations juridiques avec les tiers.


Cette clarification jurisprudentielle est un élément clé à considérer dans le cadre du droit des sociétés et des contentieux y afférents.

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